Chaque semaine Harris Interactive interroge un échantillon de plus de 2000 Français. En leur posant une question simple et tout à fait ouverte : « Qu’avez-vous retenu de la campagne présidentielle cette semaine ? ». Sans rien suggérer. Sans rien proposer. En laissant les personnes que nous interrogeons libres de nous dire et ce qu’elles ont entendu de la campagne présidentielle et ce qu’elles en ont retenu. Vu que l’on peut considérer qu’une élection se gagne déjà par une « hégémonie idéologique et culturelle » (pour paraphraser Gramsci), regardons la manière dont les électeurs parlent de la campagne.
Pour dégager l’essentiel de cette matière riche et spontanée, les réponses sont analysées par Proxem (https://www.proxem.com), pionnier de l’analyse sémantique de donnéestextuelles. Chaque semaine, Proxem y détecte les personnalités et mouvements politiques, les thématiques et événements majeurs, de manière à pouvoir en mesurer la fréquence. Semaine après semaine se dégagent ainsi les grandes tendances de la campagne et les événements singuliers qui ont marqué l’actualité.
Emmanuel Macron est, sans surprise, cette semaine la personnalité la plus citée à 35%, en lien avec son élection en tant que chef de l’Etat français. Il gagne ainsi 14 points depuis la semaine précédente, au contraire de Marine Le Pen qui en perd autant. La candidate défaite est la seconde personnalité plus citée cette semaine à 15%. Les mentions des autres candidats sont presque nulles. D’autres personnalités sont nouvellement, mais marginalement, mentionnées comme François Baroin et Christian Estrosi à 1%.
Le débat final entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen est commenté à 12%. Les personnes interrogées s’accordent à dire qu’Emmanuel Macron a gagné le débat face à Marine Le Pen dont la prestation a été jugée de mauvaise qualité, y compris parmi ses électeurs :
« Le Pen était mauvaise. » ; « Le Pen trop agressive, aucun projet. » ; « Marine insupportable, Macron un saint de garder son sang-froid. » ; « Un débat hors de contrôle, les journalistes n’ont pas tenu leur rôle, Mme Le Pen était dans l’invective et ne répondait pas aux questions. » (Electeurs d’Emmanuel Macron). « Elle s’est sabordée elle-même lors du dernier débat. » ; « Pitoyable. » ; « Lamentable » ; « Les candidats ont préféré se donner en spectacle plutôt que d’exposer leurs programmes. » (Electeurs de Marine Le Pen)
Le soulagement de l’élection d’Emmanuel Macron
Emmanuel Macron est davantage cité par ses électeurs (46%) que par ses opposants politiques. En effet, le candidat d’En Marche est évoqué par 38% des électeurs de Marine Le Pen et par 35% des personnes ayant voté blanc, nul ou s’étant abstenues. Les électeurs de Jean-Luc Mélenchon sont 37% à citer Emmanuel Macron et ceux de François Fillon, 44%.
Le candidat d’En Marche est principalement associé à sa victoire à la présidentielle. Ses partisans parlent de la victoire de leur candidat et de son discours au Louvre. Ils expriment leur satisfaction :
« Macron vainqueur beaucoup d’émotion. » ; « Historique. » ; « Très beau moment, et excellent discours. » ; « Superbe. » ; « Rassuré et heureux. ».
Les électeurs d’Emmanuel Macron au deuxième tour formulent un soulagement vis-à-vis des résultats électoraux et de la défaite de Marine Le Pen :
« On a évité le pire. » ; « Ouf. » ; « Soulagement. » ; « Soulagement et à la fois espoir et inquiétude pour la suite. » (Electeurs d’Emmanuel Macron dès le premier tour). « C’est mieux que Marine Le Pen » ; « C’est une bonne chose pour la démocratie et la République. » ; « Ouf de soulagement de cette élection et après une soirée de grand niveau. Maintenant wait and see. » ; « Émotion. » ; « Cela aurait pu être pire. » (Electeur de François Fillon puis pour Emmanuel Macron). « Soulagé. » ; « Jusqu’à la dernière seconde nous avons eu des sueurs froides de voir le visage de Marine Le Pen apparaitre. » (Electeur de Jean-Luc Mélenchon puis Emmanuel Macron). « Soulagement, mais ça n’est pas une adhésion. » ; « Je suis fier que mon pays n’est pas choisi de vivre gouvernés par les fascistes. » (Electeur de Benoît Hamon puis ayant voté pour Emmanuel Macron).
Au-delà du soulagement exprimé, les électeurs de 1er tour de François Fillon, Jean-Luc Mélenchon et Benoît Hamon qualifient leur contribution de « vote par défaut » :
« Le plus dur reste à faire … » ; « Déçu. » (Electeurs de François Fillon puis d’Emmanuel Macron). « Un moindre mal, mais un mal quand même. » ; « Vote par défaut. » ; « Je pense que c’était le moins pire. » ; « Un mal pour un bien. » « Intelligent, ouvert, déterminé, seul grand problème : c’est l’économie qui doit nous servir, pas l’inverse. » (Electeur de Jean-Luc Mélenchon puis Emmanuel Macron).
Les personnes interrogées évoquent l’avenir en s’interrogeant à propos de la nomination d’un Premier ministre et également par rapport aux élections législatives. Alors qu’elles se tiendront en juin, elles ne sont mentionnées que par 3% des personnes interrogées. Les électeurs de Jean-Luc Mélenchon et Benoît Hamon se montrent peu enclins à porter la politique future d’Emmanuel Macron, sans toutefois être totalement pessimistes. Les électeurs de François Fillon expriment eux un certain optimisme :
« Arrivera-t-il à avoir une majorité à l’Assemblée. » (Electeur d’Emmanuel Macron). « Aura-t-il les mains libres pour gouverner ? apparemment il n’aura pas la majorité à l’Assemblée. » (Electeur de Jean-Luc Mélenchon ayant voté Emmanuel Macron au deuxième tour). « Qui sera son Premier ministre ? » (Electeurs de François Fillon puis d’Emmanuel Macron).
« On verra ce que ça donne. » (Electeurs d’Emmanuel Macron) ; « En attente de la suite. » ; « Bien que j’ai voté pour lui par défaut je dois reconnaître que son discours post résultats était assez prometteur mais… Qui vivra verra ! » (Electeurs de François Fillon puis d’Emmanuel Macron). « Beau parcours reste à voir si le reste va suivre, pourquoi pas. » ; « On verra l’avenir mais une nouvelle tête ne fait pas de mal même si ce n’est pas mon candidat favori étant de gauche gauche. » (Electeur de Jean-Luc Mélenchon puis Emmanuel Macron). « On va voir ce que ça va donner… » (Electeur de Benoît Hamon puis ayant voté pour Emmanuel Macron)
Un débat d’entre-deux tours fatal à Marine Le Pen
Marine Le Pen est plus mentionnée par les électeurs d’Emmanuel Macron à 22% et des personnes ayant voté blanc, nul ou s’étant abstenu 16%. Les électeurs de la candidate la citent à 13%. Les électeurs de François Fillon la mentionnent à 19%, et les électeurs de Jean-Luc Mélenchon le font à 17%. Marine Le Pen est donc davantage mentionnée par ses opposants politiques qui expriment un soulagement de ne pas la voir élue à la présidence de la République Française.
Les électeurs de Marine Le Pen expriment une profonde déception, mais pas une surprise vis-à-vis des résultats :
« Très déçue. » ; « Extrêmement déçue même si je me doutais qu’elle ne gagnerait pas. » ; « Dommage pour le protectionnisme. » ; « Je suis triste et catastrophée. Marine Le Pen était la chance de sortir de la montée de l’islam en France, de l’immigration massive de clandestins et l’espoir de sortir enfin de l’austérité. Reste l’espoir de l’emporter aux législatives. »
Ils attribuent cette défaite au débat manqué de Marine Le Pen, mais aussi aux médias et au front républicain. Ils se disent toutefois satisfait du progrès du Front National :
« Prévisible vu le débat. » ; « Un bond dans les votes mais l’Europe et le “front anti” le Pen l’ont eue. » ; « Si les LR et les socialistes n’avaient pas retourné leurs vestes comme à chaque fois, c’est Marine qui aurait été élue. Macron n’a pas à se réjouir de sa victoire car si les autres n’avaient pas voter contre Marine, il n’aurait pas été élu car il faut qu’il se rende compte qu’ils n’ont pas voté pour lui mais contre Marine. » ; « Superbe réussite dommage que les médias n’est pas chercher des nouveaux sujets pour expliquer au personne qui les suivent pourquoi ils n’ont pratiquement pas fait de sujets sur les personnes qui sont dans les quartiers sur le front national. » ; « Macron a été élu par 25% des électeurs si l’on compte 25% d’abstentions, 11% de bulletins blancs,34% de vote MLP, et de votes provenant du PS et des LR contre MLP. L’Histoire retiendra peut-être l’acharnement médiatico-judiciaire contre Fillon et le jeu de l’Elysée dans cette affaire. Ce n’est donc pas l’homme le mieux élu de la Vème République. »
Les électeurs de Marine Le Pen expriment un espoir pour la suite et notamment les législatives :
« Elle a bien parlé et rendez-vous aux législatives. » ; « Elle n’a pas réussi. Pour moi elle n’était pas prête à devenir Présidente, peut-être en 2022. »
Les blancs et nuls ainsi qu’une abstention très… politique
Le vote blanc est spontanément mentionné à 1% et l’abstention à 2% par les personnes interrogées. Les personnes ayant voté blanc expriment un refus de choisir entre les deux candidats et qualifient la victoire d’Emmanuel Macron comme une victoire par défaut, bien qu’ils se disent également soulagés :
« J’ai voté blanc, ne faisant confiance à aucun des deux candidats. » ; « Victoire par défaut. » ; « La victoire d’Emmanuel Macron : bof, j’ai voté blanc. »
Le vote blanc et l’abstention sont perçus comme des moyens de contestation :
« L’élection présidentielle ; Elle ne reflète pas l’opinion des Français. Quand compteront-ils les bulletins blancs et l’abstention comme un vote. » ; « Les votes blancs à l’élection présidentielle. Macron n’a été élu qu’avec 30% réellement des voix des Français le second tour n’est qu’un vote de peur contre le FN et non d’adhésion voyez le reportage des actualités hier soir des français disaient “ce n’est pas mon président” ce que mon entourage et moi-même disent aussi. »
Les abstentionnistes décrivent les résultats électoraux comme sans surprise :
« Victoire attendue. » ; « Sans surprise. » (Abstentionniste). « Joué d’avance avec le soutien des médias. » ; « Aucun intérêt, c’était joué d’avance » ; « Prévisible, attendons la suite. » (Electeur de François Fillon s’étant abstenu). « Que ce soit l’un ou l’autre ça ne changera rien. » (Electeur de Jean-Luc Mélenchon s’étant abstenu).
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