Le vaccin, un possible pass sanitaire pour pouvoir consommer à nouveau ?

Enquête Harris Interactive pour Les zOOms de l'Observatoire Cetelem

L’enquête a été menée du 12 au 13 janvier 2021, auprès d’un échantillon de 1 034 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus.

 

Enquête 1/3 issue du cycle « An 1 après le début de la pandémie : se soigner, travailler, vivre en famille… quelles perspectives ? »

 

Paris, le 26 janvier,

 

L’année 2020, particulièrement mouvementée, a remis en cause les habitudes de vie, la relation aux autres, à soi, à son environnement personnel et professionnel, et a largement bouleversé la capacité des Français à se projeter dans l’avenir. En ce premier trimestre 2021 dont la fin coïncidera avec l’anniversaire du premier confinement en France, les zOOms de l’Observatoire Cetelem, accompagnés par Harris Interactive, se proposent de faire un état des lieux de la vie un an après le début de la pandémie en France : modalités de travail, rapport à la santé, liens sociaux et vie familiale… Dans un contexte sanitaire toujours incertain et sous la menace de restrictions plus fortes, nous avons voulu en premier lieu interroger le rapport des Français à leur santé et à la nouvelle possibilité de la vaccination contre la Covid-19. À quel point les Français sont-ils inquiets aujourd’hui pour leur propre santé ? Dans quelle mesure la vaccination contre le coronavirus leur apparaît-elle comme une protection et/ou comme une solution efficace pour sortir de la crise ? Quels sont les aspects de leur vie et de leur consommation qu’ils ont le plus hâte de retrouver ?

 

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Quels sont les grands enseignements de cette enquête ?

 

  • Si la grande majorité des Français s’estime aujourd’hui en bonne santé – ou du moins, en plutôt bonne santé -, la santé apparaît comme un indicateur changeant et fragile, pour qui la vigilance est toujours de mise : près de 2 Français sur 3 se déclarent inquiets à son sujet. Dans le contexte actuel, cette inquiétude se focalise surtout sur le risque de contamination par le coronavirus, dont la crainte dépasse aujourd’hui celle du risque de cancer.

 

  • Malgré les réticences pressenties fin 2020, les Français qui veulent se faire vacciner sont désormais majoritaires: ils veulent sauter le pas d’abord pour protéger leurs proches ainsi que se protéger eux-mêmes, mais aussi pour retrouver plus de liberté dans leur vie quotidienne et éviter de nouvelles restrictions.

 

  • Partagés entre un désir de retrouver une vie plus normale et une certaine défiance face aux institutions de santé (notamment le ministère de la Santé), les Français manifestent un optimisme prudent quant à la résolution de la crise en France, près d’un sur deux osant espérer un retour à la normale d’ici à la fin de l’année.

 

  • Ils sont également très divisés à l’heure actuelle quant à l’idée d’un éventuel passeport vaccinal, une petite majorité y étant favorable dans l’absolu. Dans un contexte encore incertain où l’on ne sait pas encore réellement qui pourra être vacciné et quand, une moitié de Français (52%) considère plutôt ce passeport comme une atteinte à la liberté (être obligé de présenter une preuve de vaccination pour pouvoir participer à certaines activités sociales) quand l’autre moitié (48%) y voit davantage un retour à la liberté de pouvoir à nouveau se déplacer et vivre une vie sociale sans stress d’être contaminé.

 

 

La santé, un sujet que les Français surveillent avec attention, particulièrement en cette période

 

  • Bonne nouvelle en ces temps d’interrogations sanitaires, la grande majorité des Français (89%) s’estime aujourd’hui en bonne santé. L’optimisme de cette perception est pourtant très vite à nuancer : seuls 18% des Français vont jusqu’à affirmer être « en très bonne santé », quand 71% jugent en réalité leur santé « plutôt bonne ». Ce sont surtout les plus jeunes qui se considèrent en très bonne santé (43% des 18-24 ans), tandis que dès l’abord de la trentaine, ce sentiment décline (24% chez les 25-34 ans), et ne concerne plus que 4% de la population chez les 65 ans et plus. Dans ce contexte sanitaire qui inquiète et remet en cause ce qui semblait établi, le sentiment d’être en bonne santé s’exprime avec prudence, notamment chez les plus âgés.

 

  • Et pour cause : s’ils estiment globalement être en bonne santé, les Français manifestent de vraies inquiétudes à l’égard de ce sujet en cette période de stress sanitaire. 6 Français sur 10 (61%) se déclarent inquiets pour leur santé, toutes les catégories hormis les plus jeunes – âgés de 18 à 24 ans – partageant une même crainte. La santé est ainsi perçue par les Français comme un privilège fragile, qui peut décliner facilement. Les personnes qui s’estiment à risque face au coronavirus se montrent par ailleurs parmi les plus inquiètes pour leur santé (80%), ce qui suggère que le virus est loin d’être étranger à ce sentiment d’inquiétude global.

 

  • En effet, dans le détail des risques pour leur santé, l’inquiétude des Français se focalise en premier lieu sur la contamination par le coronavirus (66% des Français se déclarent inquiets actuellement concernant ce risque), dont la crainte dépasse celle d’autres risques comme le cancer (62%) ou les maladies cardiaques (53%). Ainsi, le risque lié au virus occupe le devant de la scène sans pour autant faire oublier les maladies habituellement redoutées. Comme souvent, les femmes se montrent plus inquiètes que les hommes sur l’ensemble des risques évoqués (à l’exception des maladies sexuellement transmissibles). En cette période particulière, on note que les Français de moins de 35 ans, qu’aucun risque ne laisse complètement indifférents mais qui se situent en dessous de la moyenne pour la plupart d’entre eux, mettent particulièrement l’accent sur leur crainte de développer des maladies et troubles psychologiques (dépression, dépendance, etc.).50%, soit un jeune sur deux, les redoute.

 

Se faire vacciner, une option que les Français veulent désormais choisir, pour protéger leurs proches, mais aussi pour pouvoir reprendre une vie normale

 

  • Dans un contexte où leur santé semble menacée par le virus, les Français manifestent-ils le souhait de se protéger via un vaccin ? Malgré certaines réticences pressenties fin 2020, les Français qui veulent se faire vacciner sont désormais majoritaires : 62% souhaitent sauter le pas ou déclarent l’avoir déjà fait, une proportion encore plus forte chez les plus âgés (74% parmi les 65 ans et plus), qui s’estiment plus souvent que la moyenne faire partie des personnes à risque (74% d’intention vaccinale également). Très nettement il s’établit un lien entre la courbe d’intention de vaccination selon l’âge (où les plus âgés se montrent plus volontaires) et la réalité effective de la campagne telle qu’elle est prévue actuellement en France, invitant les plus âgés à se vacciner prioritairement. Au-delà de cet enjeu d’âge, le souhait de se faire vacciner correspond à un profil sociologique relativement bien défini : il s’agit plutôt d’hommes (les femmes se montrant plus réticentes aux vaccins de manière générale), souvent issus de catégories aisées et diplômés. Par ailleurs, un clivage politique net se dessine entre d’un côté les sympathisants EELV ou LREM, plus souvent prêts à l’idée de se faire vacciner, et de l’autre, les sympathisants RN, beaucoup plus réticents à cette perspective. L’adhésion ou non à la vaccination dépasserait ainsi le seul enjeu sanitaire pour témoigner de la confiance accordée au Gouvernement et à la façon dont il organise la campagne vaccinale.

 

  • Les Français qui souhaitent se faire vacciner indiquent qu’ils le feraient en premier lieu pour protéger leurs proches (96%), ainsi que pour se protéger eux-mêmes (94%) du virus. Mais au-delà de cet enjeu de santé, le désir de retrouver une vie plus libre apparaît également parmi les raisons primordiales invoquées par ces volontaires (94% le feraient pour retrouver une vie normale (se déplacer, se rencontrer, consommer, etc.), et 92% pour éviter de nouvelles restrictions). Cette double approche du vaccin dépasse largement les seuls volontaires à la vaccination. En effet, les Français dans leur ensemble attendent principalement du vaccin qu’il leur permette de retrouver le loisir de voir leurs proches comme ils le veulent (46%) et leur ôte le stress de tomber malade (36%)… Mais ils en attendent également de retrouver leurs libertés individuelles. Se rendre dans un bar ou un restaurant (33%), voyager (32%), faire des projets (26%), faire des sorties culturelles (25%) sont autant d’activités avec lesquelles les Français ont hâte de pouvoir renouer grâce au vaccin, qui symbolise en somme l’espoir de retrouver une vie plus normale. Concernant le retour sans aucune contrainte sur son lieu de travail, on note que les Français semblent vivre aujourd’hui une situation plutôt apaisée – le travail en physique étant permis et les règles du télétravail adoucies dans la plupart des entreprises – :  seuls 9% indiquent qu’il s’agit d’une de leurs attentes principales, reléguée au second plan face aux enjeux de la vie personnelle.

 

  • Malgré leur désir de retrouver une vie et une consommation d’avant crise, les Français sont réticents à accorder leur confiance à certains acteurs de santé impliqués dans la distribution du vaccin pour leur fournir de l’information. Ils se fient principalement aux acteurs de proximité tels les soignants, médecins généralistes et pharmaciens (entre 85% et 90% de la population). Ils accordent moins volontiers leur confiance aux grandes institutions (ainsi, 6 Français sur 10 déclarent faire confiance à l’OMS ou à l’ARS), et la plus grande défiance à l’égard des institutions est dirigée vers le ministère de la Santé (seulement 46%, soit moins de la moitié de la population déclarent lui faire confiance). On note également que les plus âgés manifestent une confiance plus grande dans les acteurs de proximité (soignants, médecins généralistes et pharmaciens) que les plus jeunes, plus défiants en général, et plus à l’écoute des réseaux sociaux (27% contre 19% de l’ensemble).

 

  • Partagés entre l’envie de retrouver une vie plus simple, un vaccin qui convainc lentement et une confiance très relative aux institutions qui le portent, les Français manifestent un optimisme prudent quant à la résolution de la crise en France. 53% pronostiquent un retour à une vie normale au cours de l’année 2021 grâce à la vaccination, contre 43% qui le situent plus tard et 4% qui jugent que ce retour n’arrivera jamais. Un optimisme plus marqué chez ceux qui souhaitent se faire vacciner, parmi lesquels 66% situent la sortie de crise durant l’année à venir. Les Français sont légèrement plus pessimistes concernant la situation dans le monde (seul un tiers de la population – 34% – estimant une sortie de crise d’ici à la fin de l’année).

 

Le passeport vaccinal, une option clivante

 

  • Alors que la campagne de vaccination démarre à peine, et que, pour de nombreuses personnes, le moment où elles pourront être vaccinées est encore une grande inconnue, la question d’un passeport vaccinal, – c’est-à-dire un certificat témoignant qu’une personne a été vaccinée contre la Covid-19, et qui pourrait devenir obligatoire pour entrer dans certains lieux accueillant des larges publics – se pose d’ores et déjà au sein de la population. Et les Français se montrent pour l’instant très partagés : avec 56% de Français favorables à ce que ce type de passeport puisse éventuellement être mis en place dans les mois à venir, l’approbation l’emporte de peu. Les plus jeunes et les plus âgés, perçus comme des populations prioritaires pour la campagne de vaccination, y sont plus souvent favorables. Les Français d’âge intermédiaire, pour qu’il la perspective de l’accès au vaccin est plus éloignée, se montrent un peu plus circonspectes (seulement 47% de favorables chez les 25-34 ans), quoiqu’elles ne s’opposent pas radicalement à l’idée. On note aussi que les plus optimistes, ceux qui projettent un retour à la normale au cours de l’année 2021, sont plus favorables que les autres à l’idée d’un passeport vaccinal. Quant à la réalisation effective de ce système de passeport vaccinal, les Français sont parfaitement divisés, la moitié estimant probable la mise en place d’un tel système dans les prochains mois, l’autre moitié l’estimant au contraire improbable.

 

  • Interrogés sur les situations éventuelles où un passeport vaccinal pourrait être requis, les Français jugent celui-ci plus pertinent lors des déplacements en direction (70%) ou en provenance (68%) du territoire français, plutôt que lors des déplacements de proximité et activités du quotidien. Leurs perceptions semblent ainsi suivre les mesures telles qu’elles sont mises en place actuellement concernant les tests: un test négatif est exigé pour pouvoir voyager, et notamment pour pouvoir entrer sur le territoire national lorsque l’on vient de l’étranger, mais rien n’oblige les Français à présenter un test négatif pour des activités du quotidien comme faire ses courses ou pénétrer dans les magasins, de nombreux lieux de rassemblements étant aujourd’hui fermés. Le passeport vaccinal semble ainsi à ce stade être plutôt perçu comme une bonne mesure. Selon les modalités qui seraient envisagées, les craintes voire les réticences pourraient toutefois se trouver exacerbées (hypothèse où ce document serait par exemple requis également pour les activités de consommation les plus quotidiennes), notamment dans un contexte où toute la population risque de ne pas avoir accès au même moment au vaccin.

 

  • S’il est un peu moins plébiscité dans ces lieux que pour les voyages, près d’un Français sur deux serait favorable à ce que l’accès aux lieux culturels, aux bars et restaurants, aux activités sportives, c’est-à-dire aux activités qui sont inaccessibles actuellement, soient soumis à la présentation d’un passeport vaccinal – une proportion plus forte chez les Français directement concernés par le virus (les personnes âgées et celles qui s’estiment à risques). Concernant les magasins, ouverts aujourd’hui avec la seule restriction du masque, un peu plus de 4 Français sur 10 restent plutôt favorables à ce que le passeport vaccinal y soit instauré à l’avenir, signe que l’envie de pouvoir consommer sans aucun risque à l’avenir est forte. En somme, compte tenu de leur soutien – pour le moment – à l’instauration d’un passeport vaccinal, il apparaît que pour près d’1 Français sur 2, le vaccin et l’obligation se faire vacciner à terme sont perçues comme des conditions sine qua non d’un retour à une vie et à une consommation normales.

 

  • En définitive, le passeport vaccinal est-il perçu sur le principe plutôt comme une atteinte ou un retour à la liberté aux yeux des Français ? Encore une fois, ceux-ci se montrent très partagés. Bien qu’ils perçoivent sa pertinence pour garantir un accès sécurisé à de nombreux lieux à l’avenir, les Français considèrent légèrement plus souvent le passeport vaccinal comme une atteinte (52%) qu’un retour à la liberté (48%). Là encore, les tranches d’âges extrêmes, plus souvent enclines à considérer qu’il permettra de retrouver des activités sans restrictions ou risques – contrastent avec les tranches intermédiaires, qui se montrent plus sensibles à la question de l’atteinte aux libertés, l’interdiction de fréquentation de certains lieux ou activités menaçant ceux qui ne seraient pas ou ne voudraient pas se faire vacciner. Au-delà des clivages idéologiques, on peut estimer à nouveau que ces tranches d’âge, moins ciblées aujourd’hui par les campagnes de vaccination, pressentent qu’elles seront parmi les dernières à avoir accès au vaccin, et anticipent peut-être qu’un système de passeport vaccinal pourrait les discriminer à l’avenir par rapport aux populations prioritaires.

 

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