Paris, le 12 avril,
Toluna Harris Interactive et Séance Publique ont lancé en début de législature l’« Observatoire Parlement », une étude barométrique qui permet de comprendre comment les Français suivent et s’approprient l’actualité du Parlement, de ses textes et de ses forces politiques. Cette troisième vague d’enquête permet de faire un point d’étape après les débats autour de la réforme des retraites et l’utilisation de l’article 49.3 par le gouvernement pour faire adopter ce projet de loi.
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Une actualité très largement dominée par la réforme des retraites, qui a un impact sur la perception des parlementaires par les citoyens
L’actualité parlementaire spontanément restituée par les Français est aujourd’hui très largement dominée par la réforme des retraites et notamment l’utilisation de l’article 49.3 pour faire adopter le texte. Une actualité mouvementée qui retentit sur l’image qu’ont les Français des institutions parlementaires.
Ainsi, une dizaine de jours après les l’annonce par la Première ministre du recours au 49.3, moins d’1/3 des Français se déclarent satisfaits du travail des parlementaires issus de chacune des formations politiques présentes à l’Assemblée, à l’exception du RN (37%). Après une hausse globale constatée entre octobre et le début de l’année, nous identifions cette fois-ci une baisse d’ensemble de la satisfaction vis-à-vis du travail des parlementaires, retrouvant les niveaux mesurés en début de législature (voire plus faible). Les parlementaires de la majorité et des Républicains sont les principaux groupes subissant cette dégradation (27% se disent satisfaits des parlementaires Républicains, -16 points depuis janvier ; 26% de satisfaits des parlementaires Renaissance, -15 depuis janvier). Notons par ailleurs que les parlementaires LIOT, particulièrement visibles lors des débats sur la réforme des retraites et le vote de la motion de censure contre le gouvernement (nouvellement testés dans cette enquête) recueillent un des niveaux de satisfaction relative les plus élevés (31%), derrière le RN (37%) et au même niveau que les écologistes (31%).
Comme lors des deux premières vagues de cet observatoire, les Français estiment que ce sont les parlementaires issus du RN qui incarnent le mieux l’opposition au gouvernement au sein du Parlement (35%, -3) devant les parlementaires Insoumis (32%, +3). Comme on le voyait déjà, les sympathisants écologistes estiment que les élus LFI se montrent de meilleurs opposants que les parlementaires issus des formations dont ils se sentent proches (qu’il s’agisse d’élus socialistes ou écologistes). On relève également que les proches de Renaissance et des Républicains identifient aujourd’hui les parlementaires Insoumis comme étant les principaux opposants au gouvernement et non les parlementaires du Rassemblement National.
Dans la lignée des précédentes mesures, les sympathisants des différentes formations politiques d’opposition attendent majoritairement de leurs élus qu’ils décident au cas par cas de voter ou s’opposer aux projets de loi portés par le gouvernement. On relève cependant que la part de sympathisants LFI et RN souhaitant que leurs parlementaires s’opposent systématiquement, bien que restant minoritaire, progresse fortement. Plus d’1/3 des sympathisants Insoumis (35%, +15) et près de 4 sympathisants RN sur 10 (39%, +12) indiquent aujourd’hui attendre une opposition systématique de la part de « leurs » parlementaires.
Une situation de majorité relative perçue positivement par les Français mais fragilisée par l’utilisation du 49.3 et les débats autour de la réforme des retraites
Quelques jours après l’utilisation de l’article 49.3 pour faire adopter le projet de loi sur les retraites, la situation de majorité relative à l’Assemblée nationale est toujours perçue majoritairement comme étant une bonne chose (65% des Français partageant cet avis, soit 1 point de moins que depuis janvier). Cependant, cet avis majoritairement positif cache certaines divergences politiques. Ainsi, par rapport à janvier, les partisans de la majorité sont aujourd’hui nettement moins convaincus que cette situation de majorité relative est une bonne chose (ils sont même désormais une majorité à penser le contraire, 59% + 13 points).
Dans ce contexte, si de nouvelles élections législatives avaient lieu, moins de la moitié des Français souhaiteraient que Renaissance dispose d’une majorité à l’Assemblée nationale (42%, -12 points) et seulement 17% une majorité absolue (-5 points). Comme c’était le cas déjà en octobre 2022 les sympathisants de la majorité présidentielle ne sont qu’une moitié à espérer cette majorité absolue (49%). Contrairement à ce que l’on constatait précédemment en revanche, les sympathisants LR sont désormais plus de 4 sur 10 (42%, +8) à souhaiter une cohabitation.
Si la situation de majorité relative semble donc toujours vécue comme une des « moins mauvaises solutions » pour les proches des formations politiques d’opposition mais également auprès des sympathisants de la majorité, les proches de formations telles que la FI ou le RN semblent moins disposés à accepter une position d’ouverture de la part de leurs parlementaires. Après l’utilisation du 49.3 et une motion de censure ayant échoué de peu, la volonté d’ouverture et de dialogue mesurée lors des vagues précédentes semble fragilisée. À l’avenir, cet observatoire s’attachera donc à mesurer si les perceptions mesurées actuellement évolueront dans les prochains mois où resteront marquées par la situation parlementaire de ce début d’année.
L’éventualité d’une dissolution de l’Assemblée nationale davantage souhaitée mais perçue comme moins probable
Dans cette enquête nous questionnions également les Français sur une possible dissolution de l’Assemblée nationale au cours de l’année 2023. Un peu plus de la moitié des Français (55%) estiment aujourd’hui que le Président de la République doit dissoudre l’Assemblée nationale, un score en progression de 6 points depuis une mesure réalisée en mars, quelques jours avant l’utilisation du 49.3. C’est une option à laquelle les sympathisants RN (69%, + 17 points), socialistes (61%, + 8 points) et insoumis (61%, + 5 points) se montrent légèrement plus favorables qu’au début du mois de mars. Quant à eux, les proches de la majorité présidentielle s’y montrent à nouveau plutôt opposés sans la rejeter en bloc pour autant (44% souhaitant une dissolution). Ce sont les sympathisants Républicains qui se disent aujourd’hui les moins favorables à une potentielle dissolution, avec un score en baisse (42%, – 7 points).
Les Français se montrent en revanche peu convaincus qu’Emmanuel Macron utilisera son droit de dissolution de l’Assemblée nationale d’ici la fin de l’année (33%, -5 points depuis la mesure de mars), une opinion peu marquée selon les clivages politiques.
Le Sénat, une institution mal perçue
Dans cette enquête, les Français étaient également interrogés sur leur image du Sénat. De façon spontanée, le Sénat apparaît comme une institution à la fois mal connue (avec un nombre élevé de réponses spontanées « rien » ou « aucun ») et associée à une assemblée âgée et conservatrice. Bien que le travail de la chambre haute a été particulièrement mis en lumière lors de l’adoption du projet de réforme des retraites (cet aspect ressortant également des restitutions spontanées), notons que les Français se montrent à l’heure actuelle plutôt partagés dans leur jugement.
Le Sénat est ainsi associé à une courte majorité à une institution complémentaire de l’Assemblée nationale : il permet d’améliorer les textes votés à l’Assemblée (61%) et d’en limiter le pouvoir (59%). Il s’agit également d’un lieu où le débat est possible (59%) permettant de faire émerger des compromis (59%). En cohérence avec les évocations spontanées, notons également que seuls 40% des Français estiment que le Sénat est représentatif de la société française.
En ligne avec la préférence pour la majorité relative à l’Assemblée nationale en cas de dissolution, 6 Français sur 10 (62%) ne souhaitent pas que la majorité présidentielle dispose de la majorité au Sénat à l’issue des prochaines élections.