Les motivations du vote et de l’abstention au 1er tour des élections départementales de 2015

Etude Harris Interactive pour M6

A l’occasion du premier tour des élections départementales, dimanche 22 mars 2015, Harris Interactive a réalisé pour M6 une enquête permettant de mieux comprendre les motivations du vote et de l’abstention à ce scrutin.

Selon des résultats nationaux publiés par le Ministère de l’intérieur1, les binômes soutenus par l’UMP-UDI arrivent en tête avec 29% des suffrages, devant le Front National, qui recueille 25% des voix exprimées. Le Parti socialiste et ses alliés (PRG) arrivent en troisième position, avec 22% des votes. La hiérarchie entre les formations politiques est néanmoins complexifiée par le score important réalisée par des binômes étiquetés comme « Divers Gauche » (7%) ou « Divers Droite » (7% également ») par le Ministère de l’Intérieur : on sait que certains pourraient être assimilés au PS ou à l’UMP, mais ce n’est pas le cas de tous. Les binômes soutenus par le Front de Gauche recueillent quant à eux 6% des suffrages, pour 2% à Europe Ecologie Les Verts. 1% des votes exprimés ont bénéficié au MoDem, et autant à des listes diverses (1%). Ceci dans un contexte où l’abstention se chiffre provisoirement à 49,8% des inscrits sur les listes électorales.

Si l’on agrège les scores réalisés par l’ensemble des formations politiques de Gauche (PS, PRG, Front de Gauche, EELV, Divers Gauche), cette sensibilité politique recueille ainsi autant de suffrages (37%) que les partis de la Droite et du Centre (UMP, UDI, MoDem, Divers Droite : 37% également). Si l’on observe les votes exprimés ce dimanche 22 mars par les différents électorats du 1er tour de l’élection présidentielle de 2012, on constate que l’électorat de Marine Le Pen en 2012 est celui qui s’est le moins dispersé pour les élections départementales : quand ils ont exprimé un vote, 85% des électeurs de la candidate frontiste en 2012 ont à nouveau choisi cette formation politique ce dimanche, tandis que cette continuité n’est observée que chez 63% des électeurs de Nicolas Sarkozy et 60% des électeurs de François Hollande. L’électorat de Jean-Luc Mélenchon en 2012 s’est davantage réparti sur des binômes Front de Gauche (35%), mais aussi Divers Gauche – dont l’on sait que certains étaient constitués d’alliance Front de Gauche-EELV – (22%), ou encore PS (22%).

Que retenir de cette enquête ?

  • En dépit d’une abstention plus réduite (49,8%) que ne l’attendaient certains observateurs, on n’observe pas un intérêt plus prononcé de la part des Français pour ce scrutin : seulement 46% d’entre eux se déclaraient intéressés par les élections départementales, ce dimanche 22 mars. La participation observée hier peut sans doute s’expliquer par un attachement des Français à leur département qui reste fort (77%, soit +7 points par rapport à une enquête réalisée en octobre 2014), même si un doute existe quant à son avenir (57% ont confiance dans l’avenir de leur département, 43% pas confiance).

 

  • Les personnes ayant exprimé un vote affirment, pour un tiers d’entre-elles (36%), s’être décidées dans les derniers jours précédant le scrutin, dont 10% le jour-même. 23% indiquent en revanche avoir fait leur choix plusieurs semaines avant le premier tour, quand 41% affirment même avoir toujours su pour qui ils voteraient. Certains électorats déclarent s’être davantage décidés dans les derniers jours de campagne : ils sont 45% parmi l’électorat Front de Gauche, 61% parmi ceux d’Europe Ecologie, 54% pour les binômes Divers Gauche. A l’inverse, les électeurs du Front National affirment moins avoir fait leur choix au dernier moment (25%), tandis que 47% indiquent avoir toujours su pour qui ils voteraient.

 

  • Au moment de glisser leur bulletin de vote dans l’urne, les électeurs déclarent avoir été particulièrement influencés par l’étiquette politique des candidats (80% déclarant que cela a joué « beaucoup » ou « assez » dans leur choix) et leur projet (76%). Les enjeux locaux (79%) ont davantage pesé que les enjeux nationaux (64%). Près de deux électeurs sur trois déclarent également avoir voté en fonction de leur situation personnelle au quotidien (64%), soit une motivation plus importante que le bilan du conseil général – sans doute mal connu – (62%), la personnalité des candidats (56%) ou leur notoriété (40%). Par rapport aux élections municipales de 2014, l’étiquette politique des candidats a donc joué un rôle autrement plus décisif hier (80%) qu’en mars 2014 (53%), de même que les enjeux nationaux (64% contre 33%). Notons qu’au sein de l’électorat du Front National, 80% déclarent que les enjeux nationaux ont « beaucoup » ou « assez » pesé dans leur vote.

 

  • Plus précisément, les personnes ayant exprimé un vote indiquent que la thématique de l’emploi est celle qui a le plus compté dans leur choix (40% ; 47% parmi les électeurs du Front de Gauche), nettement devant la sécurité (31% ; 55% parmi les électeurs du Front National), l’économie (28% ; 37% parmi les électeurs de l’UMP-l’UDI), l’éducation et la formation (27% ; 44% parmi les électeurs socialistes) et la fiscalité (27% ; 38% parmi les électeurs UMP-UDI). Suivent les inégalités sociales (25% ; 49% parmi l’électorat Front de Gauche), l’immigration (25% ; 69% parmi les électeurs FN), le pouvoir d’achat (24%) et l’environnement (23% ; 77% parmi les électeurs écologistes). Ainsi, les enjeux ayant structuré le vote des Français ne relèvent pas nécessairement des compétences des conseils départementaux. D’autres thématiques sont citées par moins d’un électeur sur quatre : les retraites (21%), la santé (21%) et dans une moindre mesure l’avenir des institutions départementales (17%), la prise en charge des personnes âgées (15%) et de la jeunesse (14%), le logement (11%).

 

  • Une courte majorité des électeurs au 1er tour des élections départementales déclare s’être positionnée en fonction de l’exécutif. Lorsqu’ils déclarent le faire, c’est le plus souvent pour se positionner de façon critique : 12% des personnes ayant exprimé un vote indiquent avoir souhaité exprimer un soutien à l’égard de François Hollande et du Gouvernement de Manuel Valls (36% parmi les électeurs socialistes, pour qui cela ne constitue donc pas une motivation majoritaire), quand 39% affirment au contraire avoir utilisé leur vote pour manifester leur insatisfaction à l’égard de l’exécutif (51% parmi les électeurs UMP-UDI, 71% parmi ceux du FN). A titre de comparaison, les élections cantonales de 2011 (qui ne concernaient qu’une partie du territoire français) avaient vu 8% des électeurs affirmer un soutien à Nicolas Sarkozy et au gouvernement, quand 38% avaient manifesté une insatisfaction à son égard, soit des proportions comparables entre le dernier scrutin cantonal et ces nouvelles élections départementales. Enfin, 49% des votants estiment que leur vote au 1er tour des élections départementales n’avait aucun rapport avec l’exécutif.

 

  • Invités à qualifier leur vote exprimé hier, les Français sont seulement 39% à indiquer que leur vote exprime une réelle adhésion envers le binôme de leur choix. 23% estiment plutôt qu’ils ont voté « utile », pour garantir la présence d’un binôme au second tour, quand 20% reconnaissent un vote « par défaut », faute de mieux. 5% qualifient leur vote « d’opposition », pour faire obstacle à un binôme concurrent, quand 13% jugent avoir émis un vote de protestation. Plus précisément, le vote d’adhésion caractérise davantage l’électorat écologiste (48%), tandis que la logique de « vote utile » est plus répandue dans l’électorat socialiste (31%). L’électorat frontiste se distingue quant à lui par la forte proportion de « vote de protestation » (37%).

 

  • 50% des personnes ayant exprimé un vote aux élections départementales déclarent avoir souhaité faire barrage au Front National dans leur canton, cette motivation étant invoquée par plus de trois personnes sur quatre dans tous les électorats de Gauche : Front de Gauche (79%), Parti socialiste (81%), Europe Ecologie Les Verts (76%) ou Divers Gauche (77%). D’ailleurs, 56% des Français estiment que ce serait une mauvaise chose si leur conseil départemental était dirigé par une majorité du Front National. À titre de comparaison, 27% émettent ce jugement critique à l’égard d’une potentielle majorité de Droite, et 35% concernant une majorité de Gauche.

 

  • Parmi les inscrits s’étant abstenus au 1er tour des élections départementales, la première motivation de l’abstention est très clairement la défiance envers les responsables politiques (46%). Ce motif devance le sentiment que le scrutin ne changera pas grand-chose dans la vie quotidienne (33%), quand 24% citent qu’il s’agit là d’une manière d’exprimer leur mécontentement à l’égard du Président de la République et du gouvernement. Ainsi, ce sont près de 40% des personnes ayant exprimé un vote mais aussi un quart des abstentionnistes qui déclarent avoir voulu sanctionner l’exécutif en place. Parmi les autres motivations de l’abstention, 23% indiquent ne pas avoir été suffisamment informés sur les enjeux de cette élection, quand 19% déplorent de ne pas s’être trouvés hier à l’endroit où ils sont inscrits sur les listes électorales. 22% affirment plus directement que cela ne les intéresse pas et 11% qu’ils avaient même autre chose de mieux à faire. 17% voient dans leur abstention une façon d’exprimer leur insatisfaction à l’égard de la gestion départementale, quand 12% que cela n’aura pas d’impact sur la situation dans leur département.

 

  • Dans la perspective du second tour, dimanche 29 mars prochain, des binômes soutenus par la Gauche, la Droite et le Front National sont en position de se maintenir simultanément dans de nombreux cantons. La question de l’attitude des formations politiques, notamment de retraits de binômes pour limiter les configurations de triangulaire, va donc constituer un enjeu majeur dans les jours à venir. Dans les cas où seuls se maintiendraient au second tour le Front National et la Gauche, les Français sont partagés quant à l’attitude attendue de la part de l’UMP : 37% souhaiteraient un appel à voter pour le candidat de Gauche, 15% pour le candidat frontiste, 7% pour un vote blanc, quand 41% ne souhaiteraient aucune consigne de vote. Les sympathisants de l’UMP eux-mêmes privilégient nettement l’absence de consigne de vote (56%), devant l’appel à voter pour la Gauche (18%), pour le FN (13%) ou le vote blanc (13%).

 

  • Symétriquement, dans les cantons où seraient présents au second tour uniquement le Front National et la Droite, 38% des Français attendent du PS qu’il appelle à voter pour le candidat de Droite, 10% pour celui du FN, 8% blanc, tandis que 43% ne souhaitent aucune consigne de vote. Mais les sympathisants du Parti socialiste émettent un vœu très largement majoritaire : que les responsables de leur formation politique appelle à voter pour la Droite (66%), solution nettement préférée au vote blanc (10%) et même à l’absence de consigne de vote (22%).

 

Retrouvez tous les résultats dans notre rapport.

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