Enquête réalisée en ligne du 11 au 12 avril 2017. Échantillon de 1 913 personnes, représentatif des Français âgés de 18 ans et plus. Méthode des quotas et redressement appliqués aux variables suivantes : sexe, âge, catégorie socioprofessionnelle et région de l’interviewé(e).
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Dans le cadre de l’élection présidentielle de 2017, la Fondapol (Fondation pour l’Innovation Politique) a souhaité mettre en place un dispositif d’enquêtes afin de mieux comprendre la façon dont la campagne électorale était perçue par les Français.
Pour cela, la Fondapol a sollicité Harris Interactive pour conduire une étude en deux temps. Un premier point a été mené mi-mars 2017, soit quelques jours avant le premier débat télévisé entre les principaux candidats[1]. Un deuxième point, réalisé à une dizaine de jours du premier tour de scrutin, vise à mesurer la manière dont la perception de cette campagne présidentielle a évolué au cours des dernières semaines, ainsi qu’à apporter de nouveaux éclairages sur cette question.
L’objectif de cette étude vise notamment à apporter des éléments de réponses aux interrogations suivantes : quel regard les Français portent-ils sur la campagne présidentielle et comment celui-ci a-t-il évolué depuis le mois dernier ? Quelle est leur opinion sur le rôle des médias et le nombre de candidats dans cette campagne ? Dans quelle mesure celle-ci modifie-t-elle leur choix concernant l’élection présidentielle ? Enfin, ont-ils une vision claire de ce qui se passera au lendemain du second tour, en fonction de l’identité du Président élu ?
[1] Enquête Harris Interactive pour la Fondapol, réalisée en ligne les 16 et 17 mars 2017, auprès d’un échantillon de 1 766 personnes représentatif des Français âgés de 18 ans et plus. Méthode des quotas et redressement appliqués aux variables suivantes : sexe, âge, catégorie socioprofessionnelle et région de l’interviewé(e).
Que retenir de cette enquête ?
- En dépit d’un intérêt qui ne se dément pas, les Français restent très critiques à l’égard de la campagne présidentielle (même s’ils se montrent un peu moins radicaux que le mois dernier), considérant que cette dernière, si elle a permis d’en savoir un peu plus sur les candidats, est passée à côté des véritables enjeux et des attentes majeures des Français.
- Les Français estiment majoritairement que les médias ne sont pas neutres dans leur traitement de la campagne des différents candidats. Ils pensent que la plupart des candidats, à commencer par François Fillon et Marine Le Pen, font l’objet d’un parti pris plutôt négatif. Seules exceptions : Emmanuel Macron et Jean-Luc Mélenchon sont considérés comme faisant l’objet d’un traitement médiatique plutôt favorable, ce qui constitue un changement majeur par rapport au mois dernier pour le candidat de la France insoumise.
- S’ils se montrent partagés sur le nombre de candidats présents à cette élection, les Français auraient tendance à privilégier, pour le futur, une offre politique plus restreinte afin de mieux clarifier les programmes qui leur sont proposés.
- Seulement 22% des Français estiment que la campagne présidentielle a fait évoluer leur choix initial. En revanche, 43% d’entre eux déclarent ne pas avoir modifié leur décision d’origine, et 29% se disent toujours indécis à une dizaine de jours du premier tour de scrutin.
- A ce stade, la majorité des Français ne voit pas de manière très claire ce que pourraient être les premières mesures prises par le prochain Président au début de son mandat, avec qui il gouvernerait, et ce, quelle que soit l’identité du vainqueur de cette élection présidentielle.
Dans le détail…

A quelques jours du premier tour de l’élection présidentielle, les Français restent très majoritairement critiques à l’égard du déroulement de la campagne, mais un peu moins qu’il y a un mois
- Lors du premier point de cette enquête, à la mi-mars 2017, la plupart des Français se disaient à la fois intéressés et très critiques à l’égard de la campagne pour l’élection présidentielle. Qu’en est-il un mois après, à une dizaine de jours du premier tour ? Tout d’abord, cette campagne continue de susciter l’attention d’une majorité de Français : 69% d’entre eux déclarent qu’elle les intéresse, et même 33% qu’elle les intéresse beaucoup, des scores similaires à ceux enregistrés le mois dernier.Par ailleurs, leur jugement à l’égard de cette campagne reste majoritairement négatif, mais néanmoins de manière un peu moins radicale qu’il y a quelques semaines. Ainsi, 81% d’entre eux estiment que la campagne n’est pas satisfaisante (-7 points), parmi lesquels 48% jugent qu’elle n’est pas satisfaisante du tout (-15 points), alors que seulement 15% s’en déclarent aujourd’hui globalement satisfaits (contre 9% le mois dernier). Les éléments d’évaluation plus détaillés de cette campagne suivent la même logique : 80% d’entre eux la jugent « décevante », et 76% considèrent qu’elle est « ratée » (-6 points dans les deux cas). A l’inverse, seulement 38% l’estiment « utile » (+6 points), et 12% « enthousiasmante » (+2 points).Observons que le caractère exceptionnel de cette campagne reste reconnu par une majorité de Français, seulement 29% d’entre eux la jugeant « semblable aux autres campagnes » (score similaire à la vague précédente).
- De fait, quand on les interroge sur leur perception spontanée à l’égard de la campagne présidentielle, les Français continuent à exprimer des jugements très critiques, marqués par le climat des « affaires » qui entoure celle-ci. Ainsi, des mots comme les « affaires », les « mensonges », la « corruption », l’« argent » restent parmi les termes les plus couramment cités.Néanmoins, en cohérence avec ce qu’on a relevé plus haut, ceux-ci sont cités de manière un peu moins systématique que le mois dernier, et on rencontre également un peu moins l’expression de certains sentiments assez durs (le « dégoût », ou la « honte » d’une situation « lamentable », etc.). Autre nouveauté, alors que François Fillon était le candidat le plus cité lors du point précédent d’enquête (avec Emmanuel Macron), les personnes interrogées cette fois-ci parlent aussi spontanément de Jean-Luc Mélenchon, dont ils évoquent la montée récente dans les intentions de vote.
- Si les dernières semaines de la campagne, marquées notamment par les débats télévisés entre candidats (et un peu moins par les « affaires » dans l’agenda médiatique), semblent avoir aidé les Français à y voir un peu plus clair dans l’offre électorale qui leur était proposée, ceux-ci conservent le sentiment que les enjeux fondamentaux restent mis de côté dans cette campagne.
Certes, une majorité estime que celle-ci « permet de se faire une idée sur les candidats (56%, +4 points), et 38% qu’elle « permet de se faire une idée sur les programmes » (+6 points). Mais seulement 24% des Français considèrent qu’elle « permet de débattre des solutions aux problèmes rencontrés par la France, même si cet indicateur est en progression (+7 points). Surtout, le fossé perçu entre les propositions des candidats et les attentes de la population reste presque aussi profond qu’auparavant: ainsi, seulement 21% des Français considèrent que la campagne « permet d’aborder les problèmes qui les préoccupent personnellement » (+6 points), et 19% qu’elle « permet aux candidats de bien savoir ce qu’attendent les Français » (+3 points).

Pour les Français, Emmanuel Macron et Jean-Luc Mélenchon bénéficient d’un parti pris plutôt positif de la part des médias, ce qui n’est pas le cas des autres candidats
- Pour la plupart des Français, le rôle des médias n’est pas neutre dans cette campagne présidentielle. En effet, plus de la moitié d’entre eux estiment que les médias présentent la campagne et le programme des candidats principaux avec un parti pris (plus de 60% en ce qui concerne Marine le Pen, François Fillon, Emmanuel Macron et Jean-Luc Mélenchon, et plus de 50% en ce qui concerne Benoît Hamon). Ce score est un peu inférieur pour les autres candidats, mais se situe néanmoins toujours entre un tiers et la moitié des
- Plus précisément, ce parti pris supposé ne va pas dans le même sens pour l’ensemble des candidats aux yeux des Français. Pour ceux-ci, deux candidats font clairement l’objet d’un traitement plutôt positif de la part des médias : il s’agit d’Emmanuel Macron (45% des Français estiment qu’il fait l’objet d’un « parti pris plutôt positif », quand seulement 19% pensent qu’il fait l’objet d’un « parti pris plutôt négatif ») et de Jean-Luc Mélenchon (41% des Français estiment qu’il est traité par les médias avec un « parti pris plutôt positif », et 21% avec un « parti pris plutôt négatif »).
Si, pour Emmanuel Macron, ces scores sont similaires à ceux enregistrés le mois dernier, en revanche ils se sont retournés de manière spectaculaire pour le candidat de la France insoumise en quelques semaines: en effet le parti pris positif supposé des médias à l’égard de Jean-Luc Mélenchon a progressé de 21 points (passant de 20% à 41%) alors que leur parti pris négatif supposé a perdu 14 points (passant de 35% à 21%). Il s’agit du seul candidat pour lequel les Français perçoivent un changement drastique de traitement médiatique, passant de majoritairement négatif à majoritairement positif, en l’espace d’à peine un mois.
- Les autres candidats sont considérés comme faisant l’objet d’un traitement médiatique plus souvent négatif que positif. C’est particulièrement le cas en ce qui concerne François Fillon (parti pris plutôt négatif pour 54% des Français, plutôt positif pour 13%) et Marine Le Pen (négatif pour 49%, positif pour 18%), même si, pour ces deux candidats, le déséquilibre de perception s’est très légèrement atténué depuis le mois dernier. Pour Benoît Hamon, en revanche, la situation s’est plutôt dégradée : 33% des Français estiment qu’il fait l’objet d’un parti pris plutôt négatif (en hausse de 2 points), alors qu’ils ne sont plus que 18% à considérer qu’il est traité de manière plutôt positive (en baisse de 8 points).
Si, on l’a vu, les autres candidats sont d’abord considérés comme faisant l’objet d’un traitement médiatique « sans parti pris » par plus de la moitié des Français (compte tenu d’une campagne moins bien identifiée car jusqu’ici moins couverte par les médias), ceux qui prennent position les jugent plus souvent comme traités avec un parti pris négatif que positif. Observons néanmoins que, suite aux réactions à ses prises de position lors du débat télévisé entre les 11 candidats, le parti pris positif supposé des médias en faveur de Philippe Poutou a progressé de 10 points (passant de 4% à 14%), quand le parti pris négatif supposé à son encontre n’a pas évolué (31%).
- Comme le mois dernier, le jugement global que suscite cette campagne présidentielle est, pour une majorité d’individus, davantage dû aux candidats (58%), qu’aux médias (36%). En effet, 49% des Français jugent que « cette campagne n’est pas intéressante, c’est surtout à cause des médias » (-3 points), quand seulement 27% pensent que « c’est surtout à cause des médias » (-2 points). De l’autre côté, 9% estiment que « cette campagne est intéressante, c’est surtout grâce aux médias » (la même proportion considérant qu’elle l’est « surtout grâce aux candidats »).
Les Français sont partagés sur le nombre de candidats qui devraient se présenter à l’élection présidentielle, et souhaitent surtout pouvoir bien clarifier les programmes qui leur sont soumis
- Y a-t-il trop de candidats dans cette élection présidentielle ? Telle est l’une des questions qui ont pu être soulevées ces dernières semaines avec le renforcement de la visibilité médiatique des supposés « petits » candidats, et notamment depuis l’expérience inédite d’un débat télévisé entre les 11 postulants le 4 avril dernier. Quand on pose directement cette question aux Français, ceux-ci se montrent très partagés sur ce sujet. En effet, si près de la moitié d’entre eux (49%) estiment qu’il y a trop de candidats qui se présentent à cette élection présidentielle, ils sont à peine moins nombreux à considérer qu’il n’y en a « ni trop ni pas assez » (43%), une infime minorité considérant même qu’il n’y a pas assez de candidats (3%).
- Or, cette question du nombre de candidats renvoie à celle, plus large, du fonctionnement du système démocratique. Est-il préférable, de ce point de vue, d’avoir une offre politique large ou au contraire plus restreinte lors de l’élection présidentielle ? Là encore, les Français ne tranchent pas. En effet, pour 47% d’entre eux, le fait qu’il y ait 11 candidats à cette élection « est plutôt une bonne chose pour la démocratie car cela permet à de nombreuses sensibilités politiques de s’exprimer », mais ils sont quasiment la même proportion (46%) à considérer que c’est « plutôt une mauvaise chose pour la démocratie car cela ne permet pas de connaître le fond des projets de chaque candidat ». Le débat reste donc ouvert dans l’opinion.
Néanmoins, quand on leur demande de se projeter sur les futures élections présidentielles, les Français tendent à se prononcer pour une clarification des programmes proposés, passant par une offre politique un peu plus restreinte qu’aujourd’hui. Ainsi, s’ils avaient à choisir entre deux possibilités théoriques, 60% d’entre eux préféreraient qu’il y ait « un nombre réduit de candidats afin de bien les identifier et savoir ce qu’ils pensent », alors que seulement 33% privilégieraient « un nombre important de candidats afin d’avoir le plus de sensibilités politiques différentes représentées dans la campagne présidentielle ».
Des choix initiaux plus confortés que véritablement remis en cause par la campagne électorale
- Au final, quel est le bilan de cette campagne présidentielle exceptionnelle à bien des égards ? Dans quelle mesure celle-ci a-t-elle fait bouger les lignes, évoluer les positions des Français ? Posée il y a un mois, cette question avait permis de mettre en évidence une influence relativement limitée de la campagne, ayant modifié les positions initiales d’à peine un quart des Français. Qu’en est-il un mois plus tard, à une dizaine de jours du premier tour ?

- Premier constat : l’inertie des choix initiaux mise en évidence dans la première vague de cette enquête s’est encore accrue ces dernières semaines. En effet, seulement 22% des Français (contre 24% le mois dernier) estiment que la campagne a modifié, à ce stade, leur décision sur ce qu’ils comptent faire le 23 avril prochain.
Ceux-ci peuvent se classer en 3 groupes distincts. Ceux qui avaient l’intention de voter pour un candidat mais qui, au final pensent s’abstenir ou voter blanc/nul parce que la campagne ne les satisfait pas, représentent 8% des effectifs (-4 points) : par rapport au mois dernier, l’effet démobilisateur de la campagne s’est donc légèrement atténué. Ceux qui, au contraire, avaient l’intention de s’abstenir ou voter blanc/nul et qui pensent voter pour un candidat parce que la campagne les satisfait, ne représentent que 3% des individus (score stable). Enfin, 11% des Français déclarent avoir fait évoluer leur choix (+2 points), en raison de la campagne et de son déroulement, d’un candidat vers un autre candidat.
- De l’autre côté, la campagne électorale ne semble pas avoir vraiment changé la donne pour près de 3 Français sur 4 (72%), ce score étant identique à celui mesuré le mois dernier. Parmi eux, 43% déclarent qu’ils avaient pris leur décision avant la campagne et que celle-ci ne l’a pas fait évoluer. Ce score est en hausse de 5 points par rapport à il y a quelques semaines, ce qui tendrait à signifier que la campagne aurait plutôt eu pour effet de conforter les choix initiaux d’un nombre croissant de Français. De l’autre côté, 29% des individus déclarent rester indécis (21% estiment qu’ils vont probablement voter, mais ne savent pas pour quel candidat, et 8% disent ne pas savoir s’ils vont voter ou s’abstenir). Si ce score est en baisse de 5 points par rapport au mois dernier, il reste malgré tout très élevé à une dizaine de jours du premier tour de scrutin.
Une vision encore floue de ce qui se passera le jour d’après, et ce quelle que soit l’identité du prochain Président de la République
- En cette fin de campagne, il est intéressant de se projeter au lendemain du second tour de l’élection présidentielle. Que se passera-t-il le « jour d’après » ? Les Français ont-ils le sentiment d’avoir une vision précise des différents scénarios qui peuvent s’écrire à partir du 8 mai en fonction de l’identité du Président élu ? Les résultats des deux dernières questions de cette enquête ont plutôt tendance à montrer que c’est pour le moment loin d’être le cas.
Tout d’abord, nous avons demandé aux Français, pour chacun des principaux candidats, s’ils avaient une vision claire ou non des mesures qui seraient prises au tout début de son mandat dans l’hypothèse où il ou elle serait élu(e). C’est plutôt le cas, d’une courte majorité, en ce qui concerne Marine Le Pen: si elle était élue Présidente de la République, 49% des Français estiment voir de manière claire ce que seraient ses premières décisions, contre 43% qui pensent l’inverse. C’est un peu moins évident en ce qui concerne Jean-Luc Mélenchon (clair pour 44% des Français, pas clair pour 48%) et François Fillon (clair pour 41% des Français, pas clair pour 51%). Et c’est beaucoup plus flou tant du côté d’Emmanuel Macron (clair pour 31% des Français, pas clair pour 61%) que de Benoît Hamon (clair pour 29%, pas clair pour 63%).
- De même, on a demandé aux Français s’ils voyaient de manière claire ou non avec qui chacun de ses candidats gouvernerait, s’il ou elle était élu(e). Là, le scepticisme est encore plus marqué, puisqu’aucun des 5 candidats testés n’obtient une majorité sur ce point. François Fillon est celui qui obtient le score le plus élevé : 40% des Français estiment voir de manière claire avec qui il gouvernerait, mais 52% pensent l’inverse. Et les résultats sont encore plus faibles pour tous les autres candidats : 34% déclarent voir clairement avec qui Marine Le Pen gouvernerait, ce score n’atteignant que 29% pour Jean-Luc Mélenchon, 26% pour Benoît Hamon, et 24% pour Emmanuel Macron. En cette fin de campagne, et quel que soit le scénario que réserve cette élection présidentielle, le « jour d’après » apparaît ainsi encore bien, pour le moment, comme un saut dans l’inconnu.
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