Le regard des Français sur l’information

Enquête Toluna Harris Interactive pour le Ministère de la Culture

Enquête réalisée en ligne du 15 au 19 septembre 2023. Échantillon de 2 068 personnes représentatif des Français âgés de 15 ans et plus. Méthode des quotas et redressement appliqués aux variables suivantes : sexe, âge, catégorie socioprofessionnelle, région et taille d’agglomération de l’interviewé(e).

 

Paris, le 4 octobre,

 

Comment les Français définissent-ils une information fiable ? Quels sont pour eux les grands enjeux de l’information aujourd’hui ?

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En dépit d’un intérêt partagé, un contexte de tensions pour l’information

  • Lorsqu’ils définissent l’idée d’« information », les Français mentionnent spontanément autant du contenu (l’actualité, les nouvelles) que différents contenants médiatiques (le journal, la télévision, la radio), rendant indissociables le fond et la forme dans la diffusion de l’information, dont ils font un enjeu de connaissance. De fait, les Français se déclarent intéressés par l’information sous toutes ses formes et à tous les niveaux : local, national, international, qu’il s’agisse de nouvelles optimistes ou plus dures. Parmi les sujets d’intérêt, ils évoquent particulièrement les enjeux liés à leur vie pratique, l’information étant perçue comme un moyen de mieux comprendre et vivre son quotidien.

 

  • S’ils se montrent intéressés par toutes les thématiques liées à l’information, les Français émettent néanmoins quelques doutes sur le contexte dans lequel elle est émise et d’abord du point de vue du respect de différentes lois et libertés. Généralement, ils estiment que les enjeux de protection du secret fonctionnent bien, surtout lorsqu’il s’agit du secret défense (79%). Mais les enjeux d’expression et de diffusion de l’information enregistrent plus de doutes : seuls un peu plus de 6 Français sur 10 (et avec une intensité faible de conviction) estiment aujourd’hui que l’indépendance de la presse ou la liberté des journalistes sont bien respectées en France. Une proportion qui, dans l’absolu, irait plutôt dans le sens d’un bon fonctionnement du système, mais qui témoigne, dans un pays démocratique qui érige la liberté d’expression comme une valeur fondamentale, d’une mise en doute de la part d’une partie non négligeable de la population. En conséquence, le droit à l’information des citoyens n’apparaît respecté en France que pour 63% des Français, dont seuls 13% estiment qu’il serait très bien respecté. Les Français semblent ainsi apporter une confiance toute relative au bon fonctionnement des enjeux de liberté d’expression et de liberté d’information dans le contexte actuel.

 

  • Surtout, les Français portent un regard plutôt pessimiste sur l’ensemble de l’univers médiatique leur permettant d’accéder à l’information. Contribuant au sentiment que la liberté d’expression des journalistes reste relative, les Français indiquent majoritairement penser que l’information distribuée par les médias traditionnels est « sous contrôle », de la part des grands groupes financiers qui les détiennent et orienteraient l’information (82%), ou, dans une moindre mesure, de la part du Gouvernent (58%). Pour un grand nombre d’entre eux, ces influences exercées sur les médias mettent en cause la crédibilité des informations, 60% des Français indiquant avoir parfois du mal à savoir si les informations diffusées dans les médias sont vraies au fausses. Ainsi, qu’il s’agisse des médias publics (56%) ou des médias privés (52%), les Français sont à peine une majorité à faire confiance aux médias traditionnels pour leur fournir une information de qualité. Et, alors que la lutte contre les fake news apparait comme l’un des enjeux les moins bien maîtrisés aujourd’hui (59% estiment cet aspect mal respecté), seuls 57% estiment que les médias font des efforts pour lutter contre la désinformation et, donc, privilégient l’audience sur la connaissance (71%).

 

  • Si les médias « traditionnels » sont porteurs de nombreux points de défiance de la part des Français, les nouveaux médias parmi lesquels les réseaux sociaux ne sont pas mieux perçus. Largement considérés comme propices à la diffusion de fausses informations (86%) et rendant difficile l’accès à une information vraie (73%), les réseaux et les opinions qui s’y diffusent sont jugés comme occupant une place beaucoup trop importante dans les débats publics (79%).

 

  • Tous les doutes émis par les Français envers les médias, traditionnels ou sociaux, contribuent à la formation d’une représentation dans l’ensemble pessimiste de l’univers de l’information et du contenu diffusé. Très majoritairement, les Français estiment aujourd’hui vivre dans une période de sur-information (82%), alors même que cette information est décalée par rapport à leurs attentes (68% estiment que les médias ne parlent pas suffisamment de leurs préoccupations), et noyée dans les commentaires témoignant plus d’une opinion que de véritables faits (78%).

 

La fiabilité de l’information au cœur des enjeux

 

  • Dans ce contexte particulièrement délicat pour l’information, les Français témoignent pour nombre d’entre eux de difficultés à trouver une information fiable (43%), seule une courte majorité (57%) estimant avoir facilement accès à des informations auxquelles ils font confiance. Dans le temps, nombreux sont également ceux qui estiment que la fiabilité de l’information s’est dégradée ces dernières années (55%), quand seuls 24% estiment qu’elle s’est améliorée.

 

  • Les principaux critères qui permettent de définir une information fiable font relativement l’unanimité chez les Français qui, nettement, font davantage confiance à des informations corroborées par des datas et des expertises scientifiques (83%, dont 34% « tout à fait confiance ») ou à des informations présentées de manière neutre (76%, dont 26% « tout à fait confiance »). Si ces deux critères rassemblent largement les Français, ils accordent également un certain crédit aux sources officielles (72%) comme aux informations qui sont relayées de manière conjointe par différents médias (69%). Mais d’autres dimensions, plus personnelles, peuvent également jouer un rôle dans le crédit qu’ils vont accorder à l’information : leur confiance en l’émetteur (71%) ou la correspondance de l’information à leur propre opinion (49%) peuvent devenir des variables de définition d’une information vraie. Si bien que, tout en faisant essentiellement consensus, les critères de fiabilité de l’information restent soumis à de nombreux facteurs qui peuvent entrer en concurrence.

 

  • Au-delà des aspects qui fondent une information fiable, quels sont les acteurs qui sont perçus comme les plus susceptibles de la transmettre ? Différentes dynamiques se jouent selon qu’on considère les interlocuteurs, les canaux de diffusion et les types de médias, qui font écho aux perceptions des Français concernant l’univers médiatique en général. Premier constat, la confiance dans les médias dans leur ensemble reste relative. 59% des Français font confiance aux médias publics pour leur fournir une information fiable, soit presque autant de confiance qu’il en est accordé aux médias privés (54%), mais plus qu’aux médias alternatifs (43%). Quoiqu’ils soient seulement relativement confiants quel que soit le type de média, les Français identifient beaucoup plus facilement les canaux traditionnels (journaux, chaines de radio ou chaines de télévision généralistes) comme des interlocuteurs de confiance qu’ils ne le font concernant les réseaux sociaux (que seuls 20% reconnaissent comme des diffuseurs d’informations fiables) les considérant encore moins crédibles que les publicités (22%).

 

  • Au-delà des médias et de leurs canaux, force est de constater que les Français font avant tout confiance à leurs proches (77%) pour leur transmettre des informations fiables, les autres interlocuteurs se plaçant à un degré de confiance sensiblement moindre. S’ils considèrent en majorité que les experts qui interviennent dans les médias constituent un émetteur de confiance (61%), ils sont plus modérés dans leur perception de la communication publique (52%) ou gouvernementale (47%). La communication publique apparaît ainsi dans une perspective paradoxale pour les Français, qui font à la fois de l’origine publique un critère de confiance pour l’information… et sont distants à l’égard des prises de parole de l’État en tant qu’émetteur.

 

Face aux incertitudes, des priorités établies pour l’avenir

  • De cette représentation sans concessions de l’univers médiatique et de sa fiabilité aujourd’hui, les Français dépeignent un rapport de plus en plus en tension avec l’information au quotidien. Majoritairement, ils estiment que les développements des dernières années dans les technologies d’information et de communication leur ont apporté davantage d’anxiété (62%), de difficultés à discerner le vrai du faux (70%) ou encore de risques de désinformation (72%), qu’elles ne leur ont apporté d’informations utiles (42%) ou d’ouverture d’esprit (40%). Et nombreux sont les sujets d’inquiétude pour l’avenir de l’information. Si l’on retrouve en première crainte la thématique récurrente du risque de désinformation (83%) porté par des technologies de plus en plus puissantes (IA, deepfakes, algorithmes, etc.), de nombreux phénomènes structurels (comme le développement de régimes autoritaires, l’influence des grands groupes financiers dans les médias ou la transition vers des médias de plus en plus partisans) sont également évoqués. L’information semble ainsi menacée de toutes parts dans les représentations des Français.

 

  • Pour l’avenir, ils identifient en réponse à ces différentes menaces une priorité sur laquelle ils se rejoignent en majorité, celle de la qualité de l’information à laquelle ils auront accès (sa fiabilité, sa pertinence, etc. : 50%, dont 27% citent cet enjeu en premier). Cette qualité sera soutenue selon eux par deux points d’attention particuliers : l’indépendance de l’information par rapport aux influences (grandes entreprises mais aussi acteurs publics, 30%) et la lutte contre la désinformation (30%). Les Français expriment néanmoins quelques difficultés à identifier les garants de cette fiabilité à l’avenir : si les journalistes (60% de confiance), les associations (59%) et les acteurs de la société civile (58%) apparaissent comme les principaux relais de confiance, jamais aucun des acteurs testés ne dépasse 10% de confiance affirmée (c’est-à-dire de réponse tout à fait confiance). L’État retrouve son statut d’acteur en demi-teinte avec 48% de confiance pour agir en faveur de la qualité de l’information à l’avenir, ce qui le place entre les médias traditionnels (54%) et les médias alternatifs (43%).

 

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