Enquête réalisée en ligne du 22 au 24 mars 2016. Échantillon de 1 002 personnes, représentatif des Français âgés de 18 ans et plus. Méthode des quotas et redressement appliqués aux variables suivantes : sexe, âge, catégorie socioprofessionnelle et région d’habitation de l’interviewé(e).
En novembre 2015, le Ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve évoquait une piste de réforme en matière de sécurité routière : le fait de confier « à des réservistes de la gendarmerie ou à des sociétés privées » les contrôles pour « les véhicules avec des radars embarqués ». Le locataire de la Place Beauvau justifiait cette proposition par le besoin de libérer les forces de l’ordre de ces contrôles « chronophages », afin de les mobiliser sur d’autres missions de sécurité publique.
Alors que cette proposition reste aujourd’hui au stade d’ébauche, et à la demande de l’association 40 millions d’automobilistes, Harris Interactive a interrogé un échantillon représentatif de la population française sur leur perception d’une éventuelle gestion des radars mobiles par des sociétés privées : quel jugement portent-ils sur une telle mesure ? Comment se projettent-ils personnellement dans cette hypothèse ? Quels objectifs attribuent-ils au gouvernement, et quelles conséquences leur semblent les plus probables ?
Que retenir de cette enquête ?
- Spontanément, les Français associent les radars mobiles à une expression très péjorative : une « pompe à fric », qui permettrait à l’État de maximiser l’argent collecté, sans que l’objectif principal ne soit forcément lié à la sécurité routière. Les réponses des Français témoignent également d’une vision floue des « radars mobiles », définis principalement par opposition aux « radars fixes », sans que n’apparaisse une distinction nette entre les radars embarqués et les autres types de dispositifs.
- De façon générale, la perspective de voir les radars mobiles confiés à des sociétés privées est massivement qualifiée de « mauvaise chose » par les Français (83%). Qui plus est, une majorité absolue des personnes interrogées (55%) va même jusqu’à affirmer qu’il s’agit d’une « très mauvaise chose ».
Le rejet est particulièrement marqué auprès des utilisateurs quotidiens de la voiture (86% mauvaise chose). À l’inverse, seules 16% des personnes interrogées estiment qu’il s’agit d’une bonne chose, dont 25% parmi les sympathisants Les Républicains (LR).
- Lorsqu’ils se projettent dans une situation de contrôle routier, 71% des Français estiment qu’il serait plus dérangeant de se faire contrôler par une société privée que par les forces de l’ordre, quand un quart juge que cela n’aurait aucune incidence sur la gêne occasionnée. Le surplus de dérangement serait davantage ressenti de la part des hommes (76%) et des sympathisants du Front de Gauche (84%), tandis que les femmes sont plus enclines à juger que cela serait comparable (29%).
- Si le gouvernement devait confier les contrôles de vitesse via radars mobiles à des sociétés privées, les Français attribuent davantage cette réforme à une recherche de gains financiers, et dans une moindre mesure à un redéploiement des forces de l’ordre, qu’à un objectif de sécurité routière.
Ainsi, environ 76% estiment qu’une telle mesure aurait pour objectif d’augmenter le montant total des contraventions collectées par l’État (80% du point de vue des automobilistes quotidiens). De même, 62% des Français associent cette proposition à une possibilité pour les forces de l’ordre de disposer de davantage de temps. 56% des personnes interrogées établissent un lien avec une volonté de réduire les dépenses de l’État.
Mais moins de 3 Français sur 10 (29%) estiment que cette réforme aurait pour objectif d’améliorer la sécurité routière. Cet avis est davantage partagé par les sympathisants LR (36%), qui attribuent sans doute par principe une plus grande efficacité aux sociétés privées, tandis que les sympathisants du Front National semblent particulièrement convaincus que la sécurité routière n’est pas un objectif du gouvernement (80%).
- Au final, les intentions que l’on prête le plus au gouvernementsont aussi les conséquences que l’on juge les plus probables : augmentation des contraventions (80%) et allègement des forces de l’ordre (66%), davantage qu’une réduction des dépenses publiques (50%) et surtout qu’une amélioration de la sécurité routière (28%). À nouveau, les sympathisants frontistes se montrent les plus sceptiques quant à l’impact en matière de sécurité routière (80% n’anticipent pas d’amélioration).
Qui plus est, 86% des Français anticipent un effet pervers majeur d’une gestion privée : elle inciterait les sociétés concernées à réaliser des contrôles aux endroits où elles ont le plus de chances de constater des infractions, pas forcément dans un objectif de sécurité routière. Soulignons toutefois qu’il s’agit d’une critique déjà adressée aux forces de l’ordre, notamment dans les évocations spontanées sur les radars mobiles. En revanche, les Français n’anticipent pas réellement une réduction de l’effet de dissuasion des contrôles de vitesse (seulement 34%, mais 49% parmi les sympathisants de Gauche).
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Quand bien même les radars mobiles sont déjà associés par les Français à des évocations très péjoratives, dans une quête de profit plus que de sécurité routière, le fait de confier leur gestion à des sociétés privées accentuerait encore davantage ces critiques, tout particulièrement de la part des personnes utilisant régulièrement la voiture pour se déplacer et des sympathisants du Front National.
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