Paris, le 8 juin,
À la demande de l’agence SQLI Digital Expérience, Harris Interactive a interrogé un échantillon représentatif de la population française concernant l’articulation entre le développement du numérique et la protection de l’environnement. Il s’agissait notamment de comprendre comment les Français se représentent l’équilibre actuel en la matière, d’identifier la dynamique qu’ils anticipent pour l’avenir et de faire émerger les efforts individuels comme collectifs envisageables dans cette direction.
Que retenir de cette enquête ?
Le numérique est aujourd’hui identifié comme un secteur qui pèse sur l’environnement
Spontanément, quand ils pensent à l’impact du numérique sur l’environnement, les mots les plus utilisés par les Français esquissent un a priori péjoratif : « pollution », « consommation d’énergie » … De prime abord, le numérique semble identifié davantage comme un poids pour l’environnement que comme un atout.
Et cette analyse des évocations spontanées se vérifie aussi dans les chiffres : interrogés directement concernant l’impact qu’ils attribuent au numérique sur l’environnement, 45% le qualifient de négatif, contre 39% y voyant plutôt un facteur positif. Ce poids que constituerait le numérique pour l’environnement vient nuancer le sentiment que la digitalisation constitue un gain en matière de développement économique (66%), d’emploi (59%) mais aussi de qualité de vie au quotidien (63%).
Plus concrètement, environ 6 Français sur 10 attribuent un impact négatif sur l’environnement à la consommation électrique des outils numériques (65%), à la construction de nouveaux objets (63%) ou d’infrastructures de relais (60%), mais aussi au stockage sur le cloud (57%).
Toutefois, cette vision d’un espace numérique dégradant des aspects environnementaux n’est pas universelle : les profils jeunes (moins de 35 ans) se déclarent sensiblement moins convaincus du caractère néfaste pour l’environnement, à tous les niveaux. Tandis que les seniors (50 ans et plus) portent au contraire un diagnostic particulièrement alarmiste.
La démocratisation des usagers numériques a conduit à une dépendance consciente à l’égard du numérique – particulièrement visible chez les jeunes générations
La plupart des Français assument une forme de dépendance à l’égard du numérique. 72% des Français jugent important d’avoir accès à Internet en permanence ; 63% admettent qu’il leur devient vite difficile de se passer d’un outil numérique une fois qu’ils ont commencé à l’utiliser. Cette dépendance est plus marquée chez les jeunes : ces derniers sont même 57% à affirmer qu’il est important pour eux de posséder les objets numériques dernier cri, tandis que ce besoin n’est partagé que par 16% des seniors.
D’ailleurs, lorsqu’ils choisissent un outil ou un service numérique aujourd’hui, les Français reconnaissent sans peine qu’ils prennent en considération un grand nombre de critères. Les plus structurants sont liés à la qualité des flux numériques à leur domicile : 81% accordent une importance élevée à la qualité d’image sur leur téléviseur et 80% à leur débit Internet fixe. Plus des deux tiers des Français se déclarent également attachés à des aspects de performance sur le numérique itinérant : vitesse de téléchargement mobile (73%), qualité des photos prises (70%) et des vidéos regardées (66%) depuis un smartphone … Avec, à nouveau, un clivage générationnel notable : si les seniors sont surtout attachés à la qualité de flux à leur domicile, les jeunes expriment un niveau d’exigence similaire sur les critères liés à l’usage numérique en itinérance.
Pour autant, les Français se déclarent prêts à faire des efforts au niveau individuel, envisageant même de ralentir certaines accélérations numériques si cela permet de préserver l’environnement
Néanmoins, lorsque l’on place les Français dans un arbitrage binaire entre, d’une part, accélérer le développement numérique au détriment de l’environnement et, d’autre part, réduire l’impact environnemental même si cela doit freiner le développement numérique, leurs réponses penchent davantage vers la responsabilisation environnementale que vers l’accélération numérique. Y compris sur leurs critères de choix qu’ils jugeaient les plus importants : 53% des Français seraient prêts à freiner le développement des débits Internet à domicile si cela permettait de préserver l’environnement ; 57% affirment y être prêts également pour la qualité d’image sur leur télévision. Ces arbitrages éco-responsables sont plus nettement majoritaires encore sur le développement du cloud (67%) ou la qualité des vidéos sur smartphone (65%). Avec toutefois un bémol. Une nouvelle fois, les jeunes se déclarent moins prêts que leurs aînés à ralentir le développement du numérique : les moins de 35 ans s’avèrent ainsi très partagés sur ces différents arbitrages, la moitié d’entre eux privilégiant l’environnement quand l’autre moitié choisit plutôt l’accélération numérique.
Sur le principe, 71% des Français se déclarent d’ailleurs prêts à faire des efforts dans leur utilisation des outils numériques pour réduire l’impact de leur comportement sur l’environnement, soit presque autant que les efforts similaires auxquels ils affirment être enclins dans leur alimentation (84%) ou dans leurs déplacements (71%).
Et au niveau collectif, les Français sont unanimes pour désigner l’impact environnemental du numérique comme un chantier prioritaire pour l’avenir
S’il est un effort qui fait consensus aux yeux du grand public, c’est celui attendu de la part des entreprises fabricant des objets numériques : 91% des Français jugent prioritaire d’augmenter leur durée de vie ; 86% regrettent une perte d’autonomie trop rapide de la batterie ; 80% déplorent une obsolescence trop rapide. À chaque fois, il s’agit également de constats partagés par une écrasante majorité, y compris chez les jeunes.
Plus largement, 85% des Français estiment qu’il devrait être prioritaire de réduire l’impact du numérique sur l’environnement dans les années à venir. Avec, à nouveau, un jugement relativement homogène parmi toutes les générations.
Cette attente se dirige envers de nombreux acteurs, privés comme publics : non seulement les pouvoirs publics français (81%) voire l’Union européenne (75%), mais aussi les citoyens (80%) et les entreprises (83%).
D’ailleurs, les attentes à l’égard des entreprises n’émergent pas seulement des citoyens, mais aussi de leurs salariés. 68% des salariés français estiment aujourd’hui que leurs activités numériques professionnelles ont un impact sur l’environnement et 74% estiment que leur entreprise devrait réduire cet impact (même si 66% reconnaissent à leur entreprise de déjà faire un premier effort en la matière).
Au-delà de l’injonction à agir, l’optimisme des Français reste néanmoins mesuré : ils ne s’attendent pas à un renversement de l’impact environnemental du numérique, même s’ils misent sur une généralisation des bonnes pratiques en la matière
On l’a vu, les Français estiment aujourd’hui que le numérique pèse négativement sur l’environnement, en dépit d’un impact plus positif dans d’autres domaines. Et comment anticipent-ils l’avenir ? La réponse est claire : avec un certain scepticisme. En effet, ils s’attendent aussi à ce que le numérique ait un impact négatif à l’avenir (53%). Seulement 27% anticipent un impact positif. Plus généralement, sur l’ensemble des critères testés, les Français estiment que le numérique aura un impact moins positif à l’avenir qu’il n’en a aujourd’hui. Cette tendance s’inscrit dans un contexte plus large, celui d’un rapport dégradé à l’avenir : en fin d’année dernière, 57% des Français se déclaraient pessimistes pour l’année 2021, un niveau record dans le cadre d’un baromètre annuel réalisé sans discontinuer depuis 2010[1].
Pour autant, sur ce lien entre numérique et environnement, les Français identifient un certain « sens de l’Histoire » : concernant de nombreux gestes responsables en matière numérique, les Français anticipent qu’ils deviendront plus fréquents à l’avenir. C’est notamment le cas concernant l’usage de sites d’occasion pour les objets de seconde main (66%), le recyclage des objets numériques (65%), la réparation des objets en panne ou cassés (63%), etc. Même le tri des mails, geste à la portée de tous ou presque dès aujourd’hui mais qui reste peu pratiqué, apparaît comme une pratique d’avenir aux yeux de 51% des Français.
Notons enfin que cette vision de l’avenir est particulièrement partagée par… les seniors. En effet, les jeunes sont un peu moins convaincus que l’ensemble de ces gestes vont devenir plus fréquents dans les années à venir.
[1] https://harris-interactive.fr/opinion_polls/barometre-bilan-et-perspectives-2020-2021/