Paris, le 8 novembre,
Pour la 4ème année consécutive, Procivis, en partenariat avec la Fondation Jean-Jaurès, a fait appel à Harris Interactive pour interroger les Français sur les thèmes de l’habitat et du logement. Ce baromètre à large spectre – plus de 10 000 Français ont été interrogés – permet d’analyser finement et dans le temps le sujet du logement dans ses différentes facettes : mobilités et parcours d’habitation personnels, rapport au bâti et à la densité de l’habitat, aspirations et idéaux en matière de lieux de vie, regard sur le coût du logement ou encore sur les travaux de rénovation énergétiques… L’enquête de cette année s’est penchée tout particulièrement sur l’appétence pour la propriété immobilière. A l’heure où la hausse des taux des crédits immobiliers rend l’accès à la propriété plus coûteux, où les transactions immobilières se réduisent, où la part des ménages propriétaires de leur résidence principale a baissé pour la première fois en France depuis 20 ans, et où de plus en plus de commentateurs parlent d’une « crise du logement », les Français ont-ils changé leurs idéaux de propriété immobilière ? Observe-t-on un renoncement à la propriété, une résignation chez ceux qui ne sont pas propriétaires ? Le contexte présenté ci-dessus amène-t-il à se tourner plus facilement vers de nouvelles façons d’accéder à la propriété ? Pour répondre à ces questions, Harris Interactive a interrogé un échantillon de 11 059 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus.
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Que retenir de cette enquête ?
Un budget consacré à logement toujours plus lourd et un accès à la propriété qui paraît plus difficile
Aujourd’hui, 81% des Français trouvent la part de leur budget consacrée au logement importante, soit une hausse de 10 points depuis 2020. Il y a 3 ans, alors qu’un 1 Français sur 5 jugeait cette part « très importante », ils sont désormais 1 sur 4. Cette hausse se fait particulièrement ressentir chez certaines catégories de population, notamment les locataires (+9 points) plus que les propriétaires (+4). Dans le même temps, on observe une satisfaction vis-à-vis du logement légèrement à la baisse depuis 2020 : si 89% des Français indiquent être satisfaits de vivre dans leur logement, seuls 40% indiquent en être « tout à fait satisfaits » (soit une baisse de 5 points par rapport à 2020), au cours de la même période, la satisfaction vis-à-vis de la commune d’habitation reste quant à elle inchangée. Comme les années précédentes, les locataires sont nettement moins satisfaits (27% de « très satisfaits ») de leur logement que les propriétaires (49%). Pour autant, les souhaits de déménagement restent stables par rapport aux années précédentes : 36% aimeraient déménager dans les mois à venir, dont 14% aimeraient « tout à fait » le faire. Parmi ceux qui souhaitent « tout à fait » déménager, pas moins de 45% trouvent leur budget logement « très important », ce qui suggère qu’il s’agirait davantage de déménagements contraints que souhaités. Aussi, la plupart des Français jugent qu’il est plus difficile d’accéder à la propriété aujourd’hui qu’il y a 5 ans, en 2018 : 75% sont de cet avis, dont 39% jugent cela « beaucoup plus difficile ». Les Français qui ne sont pas propriétaires se sentent freinés dans l’accès à la propriété autant par les prix des biens (89%), que par le niveau actuel des taux d’emprunt (86%).
Malgré un contexte difficile, des projets qui se maintiennent
Le contexte économique actuel ferait-il renoncer la population française à ses projets de déménagement ou d’achat immobilier ? Rien n’est moins sûr. Les Français indiquent tout autant, si ce n’est plus que les années précédentes, avoir fait des démarches pour acheter un bien au cours des derniers mois : qu’il s’agisse simplement de consulter des annonces immobilières (55%, +8 points par rapport à l’an dernier) ou plus concrètement de prendre contact avec des vendeurs (31%, +4 points) voire visiter un bien (31%, +6 points). Comme l’an dernier, ces projets visent d’abord l’achat d’une résidence principale (69%), nettement devant les projets d’investissement locatif ou d’achat d’une résidence secondaire, respectivement à 16% et 15%. Tout se passe donc comme si les ambitions des Français en matière d’achat immobilier n’étaient pas ou très peu altérées par l’état actuel du marché immobilier et la conjoncture économique. Aussi, les critères de choix d’un éventuel nouveau logement restent les mêmes que les années précédentes, au premier rang desquels une bonne isolation à la fois thermique et phonique, une bonne luminosité, un accès à l’Internet très haut débit ou encore la proximité des commerces – rien n’indique donc que les Français aient revu à la baisse leurs exigences en la matière.
L’idéal de la propriété immobilière et d’une maison individuelle, un rêve qui persiste
Loin d’avoir assoupli leurs critères de choix en matière de logement, les Français ne semblent pas renoncer non plus au rêve de la propriété. Si celle-ci apparaît plus difficile à obtenir que par le passé, elle reste pour autant très attractive aux yeux de la population. En effet, les Français s’accordent (81%) dans le fait qu’être propriétaire de sa résidence principale a plus d’avantages que d’inconvénients. Sur cette question, hommes et femmes, jeunes et plus âgés partagent le même avis. De même chez les locataires, une nette majorité (70%) voit dans la propriété davantage de bénéfices que d’inconvénients.
Aussi, chez les Français qui ne sont pas propriétaires de leur résidence principale, une majorité (61%) exprime comme objectif de le devenir. Néanmoins, les positions sont assez partagées sur le sujet, allant de ceux pour qui devenir propriétaire constitue un objectif prioritaire à accomplir le plus vite possible (25%), à ceux pour qui ce n’est pas du tout un objectif (23%). Par ailleurs, l’ambition de devenir propriétaire est plus souvent exprimée par les hommes (66% d’entre eux) que par les femmes (57% d’entre elles) et par les personnes les plus aisées que les autres. Au global, chez l’ensemble des non-propriétaires de leur résidence principale, seule une moitié (53%) pense le devenir un jour quand 20% estiment qu’ils ne le seront « certainement » jamais.
Outre l’idéal de propriété, la maison individuelle s’impose comme l’idéal pour 3 Français sur 4, quand seul 1 sur 4 lui préfère l’appartement. Une préférence très stable depuis le début du baromètre en 2020. Les options semblent moins tranchées quand il s’agit de choisir entre le neuf et l’ancien. À choisir, pour acheter leur résidence principale, les Français s’attachent plus souvent à l’idée d’acquérir une maison dans l’ancien (46%) qu’à celle de la faire construire (26%)… mais lorsqu’ils penchent plutôt pour l’appartement, le neuf les attire davantage (20%) que l’ancien (8%). Ainsi, on observe au global une appétence non négligeable pour le marché immobilier neuf, bien que celui-ci ne représente qu’une faible part de l’offre existante.
Enfin, concernant le mode d’accès à la propriété, les Français préfèrent massivement investir en couple (62% privilégieraient cette option) ou seul (33%) qu’investir à plusieurs, avec des proches (5% seulement). Chez les 18-24 ans, l’appétence pour l’investissement à plusieurs est légèrement plus forte que dans les autres tranches d’âge, tout en restant très minoritaire (12%).
Ainsi, les Français semblent rêver de la propriété dans sa forme la plus classique, à savoir une maison individuelle dont ils seraient les seuls propriétaires (ou avec leur conjoint) et qui constituerait leur résidence principale.
SCI, Bail réel solidaire, location-accession… Les nouvelles modalités d’accession à la propriété, encore mal connues et peu attractives pour les Français
Dans le contexte économique et immobilier tendu que vivent les Français actuellement, nous les avons interrogés sur leur appétence pour des modalités d’accès alternatifs à la propriété immobilière. Une appétence qui, d’après les résultats, ne semble pas particulièrement confirmée. En effet, au premier abord, les Français manifestent une faible connaissance des différents dispositifs existants, tels que la SCI (31% indiquent savoir ce dont il s’agit), le principe de la location-accession (30%) ou encore celui du bail réel solidaire (14%). Seul l’achat en viager est majoritairement connu (62%). Et, même après une rapide explication de ces principes, peu semblent s’y intéresser : 31% indiquent qu’ils seraient prêts à devenir co-propriétaires d’un bien avec des personnes habitant sous le même toit, 22% seraient prêts à investir avec des personnes n’habitant pas sous le même toit, et 21% déclarent qu’ils seraient prêts à acheter les murs du logement sans le terrain. Une appétence qui n’est généralement pas plus forte chez les non-propriétaires. Seule exception, l’achat effectué après avoir déduit des loyers du prix d’achat attire davantage (58% au global, et 63% chez les non-propriétaires).
Être propriétaire au détriment des performances énergétiques ?
Certes, les Français reconnaissent volontiers que leur logement peut encore être amélioré du point de vue de la performance énergétique. Un sentiment qui est tout à la fois majoritaire (71%), autant partagé chez les locataires que chez les propriétaires et en progrès depuis l’an dernier (+4 points). Néanmoins, rares sont ceux qui connaissent la performance énergétique réelle de leur logement. Près de la moitié de la population (45%) affirment ne pas connaître l’étiquette énergétique de leur logement, un chiffre à peine plus bas que l’an dernier (-3 points). Quant aux 55% restants, comme l’an dernier ils tendent à surestimer nettement cette étiquette : seuls 15% de ceux qui se prononcent pensent être classés E, F ou G, alors que ces logements représentent environ 40% des résidences principales en France. Non seulement l’étiquette énergétique semble donc encore assez méconnue, mais l’intention de réaliser des travaux de rénovation énergétique n’apparaît pas comme une priorité aujourd’hui chez les Français. En effet, les propriétaires de leur résidence principale sont moins nombreux que l’an dernier à déclarer avoir l’intention d’effectuer des travaux de rénovation dans l’année à venir (27%, -3 points). De plus, la classe énergétique paraît légèrement moins souvent être un critère crucial pour choisir un nouveau logement, même si cela reste un critère de première importance : 91% le jugent « important », dont 49% « très important », contre 94% et 58% en 2022.
Chez les propriétaires bailleurs en revanche, l’histoire est un peu différente. Ils ressentent plus que l’an dernier la pression liée aux restrictions de location à venir dans le cadre de la lutte contre les « passoires thermiques » : 59% d’entre eux pensent qu’ils devront faire des travaux de rénovation pour échapper à ces restrictions (+4 points) et 45% estiment qu’ils devront retirer un logement de la location (+7 points). À 40%, la part de ceux qui souhaitent faire des travaux de rénovation dans le logement qu’ils mettent en location reste stable et élevée.
De leur côté, les locataires accueilleraient volontiers des travaux de rénovation faits par les propriétaires à condition que ces travaux leur permettent de faire des économies d’énergie au quotidien et certains affirment même qu’ils seraient même prêts à consentir à une augmentation de loyer en échange de tels travaux. En effet, 48% des locataires indiquent qu’ils accepteraient une telle augmentation de loyer tant qu’elle reste inférieure à 10%, et 9% de locataires indiquent même qu’ils accepteraient une augmentation supérieure à 10%.
En somme, malgré une conscience accrue des besoins de rénovation énergétique, les Français semblent moins enclins à réaliser concrètement des rénovations énergétiques que l’an dernier, même si cet enjeu reste aujourd’hui au cœur de leurs priorités.
Conclusion
Cette nouvelle vague du baromètre Habitat réalisé pour Procivis montre que les projets immobiliers des Français s’inscrivent dans une étonnante stabilité malgré un contexte économique particulièrement tendu du point de vue du logement. Les idéaux de maison individuelle et de propriété restent bien ancrés, tandis que les nouvelles manières d’investir comme les propriétés partielles ou partagées, qui pourraient apparaître comme des solutions adéquates aux difficultés rencontrées, ne suscitent pas l’engouement attendu, ni chez les propriétaires, ni chez ceux qui ne le sont pas. Tout se passe donc comme si les Français, conscients des difficultés actuelles d’accès au logement, n’avaient pas pour autant adapté leurs exigences et leurs aspirations en matière de logement au contexte et aux projections du marché.